C'est le mois des coups de théâtre.
Acte I: Uppercut. Double-Face m'annonce qu'il a retrouvé l'amour. J'ai l'impression qu'on a supprimé tout l'oxygène de mon environnement immédiat et je passe la nuit à me poser mille questions, au bord des larmes. Mon monde se vide d'un coup. La semaine suivante se passe dans un brouillard, je réfléchis beaucoup: il était évident que ça devait arriver, et je suis bien contente qu'il m'en ait parlé même si ça ruine tous mes fantasmes. Je pense à lui non-stop pendant une semaine en me refaisant mille fois la scène qui ne se jouera donc jamais de notre prochaine entrevue, plus toutes les scènes précédentes. Je suis dotée d'une mémoire incroyable pour graver dans ma tête le moindre fait et geste, et donc, pour retenir le moindre mot, ce qui est une source de torture assez peu étudiée par la science. pour ajouter à mon tourment, il me dit que ça n'empêche pas qu'on se voie bientôt et que ça ne change pas le fait qu'il aime toujours ma compagnie. Je me dis qu'il dit ça pour m'offrir un semblant de consolation et lui dis que je le tiendrai au courant quand je viendrai dans sa ville, ce que je n'ai pas l'intention de faire.J'ajoute qu'avant qu'il ne mefasse l'aveu fatal, j'ai bien évidemment eu le temps de m'enfoncer lamentablement en lui avouant tout le trouble qu'il me causait. Je lui conseille d'autodétruire mes 7689 phrases précédentes, et il me dit que c'est pas grave, "ça n'était pas désagréable". Je suppose que s'entendre dire qu'on est une bombe de séduction irrésistible, ça fait toujours plaisir, surtout quand on a le privilège de choisir à qui on va finalement confier le détonateur. Bref.
Entracte. Les jours passent.
Acte II: Double-Face me rappelle pour prendre de mes nouvelles (?). Il croit peut-être que je suis dévastée par sa révélation (ce qui somme toute n'est pas complètement faux). Je lui réponds d'un ton assez badin, et de fil en aiguille il me demande quand je viens. Je lui dis que je n'ai pas beaucoup de possibilités avant décembre, il râle que c'est loin, et je lui dis qu'on trouvera bien un moment puisque quand on veut on peut... Ce à quoi il me répond que quand on raisonne comme ça on fait des choses pas raisonnables. Je lui réponds que le raisonnable, j'en ai un peu ma claque et ça me suffit d'avoir la raison au boulot. Je lui dis que de toute façon son entrée en couple marque le fait qu'il est devenu raisonnable.
Et là, il me dit "ça dépend de toi, tu es mon facteur de déraisonnabilité". Il est fou, il a été bourreau dans une autre vie, il fait exprès de me tendre la perche ou bien il sait pas ce qu'il veut?? Je lui dit que je sais me tenir et que s'il est en couple et veut le rester c'est pas moi qui irai tout foutre en l'air, et que je saurai être raisonnable même si ça me coût. Il me répond "pour moi aussi c'est dur". Mais? Que??? !!! Il est définitivement fêlé. Je lui dis que du coup je serai raisonnable pour deux puisque la convention sociale nous l'impose! Il me dit "je ne sais pas trop encore si c'est mon truc".
Bon, je ne sais plus quoi lui dire. Qu'est ce qu'il veut à la fin? Il sait que moi je le veux lui, j'ai été un peu trop directe une fois où j'étais un peu évaporée. C'est lui mon facteur de déraisonnabilité bon sang!!
Je ne sais pas si je serais capable de le voir sans déraisonner, du coup, pour le moment je m'arrange pour qu'il n'y ait pas rencontre, et lui il me lance des appâts pour voir, pff. C'est cruel. Ca m'arrangerait qu'il ne choisisse pas trop de raisonnabilité, mais à la longue c'est pas possible. Il va retrouver sa conception romantico-fleur bleue du couple, épouser sa damoiselle, avoir des enfants et je serai encore une adulescente incomprise et terrifiée par l'âge de raison. Résumé comme ça, je tombe en plus dans la littérature de plage pour trentenaires désabusées, c'est affligeant.
Bref, j'attends l'acte III, qui sera donc soit silence radio total et éternel; soit rupture avec sa copine dans un avenir incertain.
Quant à Fantômas, j'ai tenté une prise de contact qui s'est soldée par un échec retentissant; je crois qu'il est passé du côté obscur de la vie normale...